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snap shot . Au XXe siècle, c’est la fixité et la spontanéité qui sont pensées comme l’essence de la photographie. Dans la photographie de reportage, le temps est aussi médiatisé, par la technique et l’évènement. Le temps est pensé comme une ligne chronologique découpée en tranches. L’instant décisif serait une sorte d’équivalent temporel de l’image- mouvement. Reporter , R. DEPARDON (1981)_ L'événement médiatique est un temps court par rapport au temps de la prise de vue, le photographe cherche donc à en concentrer la force en un instant privilégié. Dans l'instantané, le photographe essaye aussi d'extraire un moment dans le flux du temps. Pour Bresson, la photographie serait une synthèse de l'événement ; il définit l’instant décisif comme « prendre sur le vif des photos comme des flagrants délits » dans Image à la Sauvette (1952). « Photographier, c'est dans un même instant et dans une fraction de seconde reconnaître un fait et l'organisation rigoureuses de formes » !Ces deux modèles temporels classiques s’opposent (durée/instantanéité) mais reposent en fait sur une même conception générale du temps (chronologique, linéaire) dans laquelle tous deux choisissent certains points ou coupes, généralement choisis parce qu’ils permettent de représenter une action. !Nous allons maintenant remettre en cause le fait que la photographie, comme image fixe, ne représente pas le mouvement contrairement au cinéma. C’est parce qu’elle arrête le mouvement qu’elle peut le représenter, et ainsi le rendre sensible, alors que le cinéma est le mieux à nous faire sentir la fixité, l’immobilité, dans le sens où il recompose et suit le mouvement. 2. « Cinéma de papier », de la photographie au cinéma. !Ce qui est sensé faire l’essence du cinéma évolue en fait au cours du temps et est questionné sans cesse : plus que le mouvement, ce serait la mise en série des images qui ferait l’essence du médium (à l’échelle des photogrammes, équivalents aux plans). La séquence photographique est au-delà du photographique pur et en-deçà du cinématographique. Dans L’Entre-Images , Raymond BELLOUR dit que « La durée cristale (la séquence photographique) est la distorsion la plus naturelle et la plus étrange infligée à son essence supposée. » C’est une distorsion étrange puisque dans la lignée de la peinture. La photographie est une image unique et, même dans une pellicule, on sépare l’image de son lien de continuité avec les autres images pour en faire une photographie. Différence entre série et séquence : Le sens général de série peut être « ensemble composé d’éléments de même nature ou ayant entre eux une unité » ; dans le sens artistique : « ensemble composé d’oeuvres qui possèdent entre elles une unité et forment un tout cohérent ». Une séquenc e est une suite ordonnée d’éléments ou de phases dans le temps ou dans l’espace (> montage). Dans sa série Panoramic San Fransisco (1877), Edweard MUYBRIDGE cherche a mettre en valeur « l’instant particulier » que le photographe recherche. ! L’Histoire de l’art a tendance à réfléchir à la photographie uniquement à travers les productions artistiques, ce que Burgin dénonce en disant qu’on néglige ainsi notre expérience quotidienne de la photographie (fait commun au visionnage de toute photo : on les regarde en série). Pour lui, le regard est d’abord fasciné, mais prolongé, la photo y devient vite résistante et appelle à sa mise en séquence (qui a d’ailleurs été longtemps en vogue dans la presse photographique ou les ouvrages). L’introduction de la photographie dans la presse va changer la vision du monde populaire : une fenêtre s’ouvre ainsi sur le monde, pour le citoyen qui ne connaissait avant de visu que son bourg, ses connaissances, mais qui ne savait par exemple pas à quoi ressemblait son président. En 1886 dans Le Journal Illustré, parait le premier entretien photographique, qui cherche à raconter l’entretien par le médium (texte et images reliées). Dans La Vie Illustrée (1899), chaque photo représente un moment particulier d’une série (ce n’est pas une prise documentaire mais une performance inventée pour la photo). A travers ces deux exemples, on dénote déjà une tendance à la mise-en-scène et au documentaire. !Dans les années 20-30, émerge une nouvelle catégorie de travailleurs dans la photographie : les producteurs (qui s’occupe des sélections et éditent des recueils, des ouvrages). A cette époque, apparaissent aussi les historiens d’arts, qui travaillent à partir de documents photographiques. Dans le photo-journalisme, on n’utilise plus une photo illustrative mais un agencement d’images qui rendent ainsi compte d’un évènement. Puis tendance à mettre l’illustration photographique au centre des politiques éditoriales des journaux d’actualité. La séquence dans le journalisme a bien pour but de restituer l’évènement dans sa chronologie. C’est aussi la présence du photographe qui accroit la valeur de preuve du médium (exemple d’ Un homme tombe dans la rue, de Brassai, 1932 : la narration concerne à la fois l’évènement de la rue mais aussi l’expérience du photographe à sa fenêtre en train d’enregistrer). La photo se rapproche alors du montage cinématographique classique puisqu’organisée dans le temps à partir d’une action, d’un espace. Des années 20 aux 70s, ce genre de séquence photographique prolifère dans la presse, jusqu’à la rupture causée par la place de plus en plus grande prise par la télévision (rapidité de transmissions, public plus large) et les conséquences de la crise pétrolière. La conception de la pratique photographique et du photographe change alors : ceux-ci se retrouvent « libérés » de la nécessité d’informer et revendiquent alors leur position d’auteurs (ils changent pour une pratique plus réflexive, moins dictée par l’actualité). On retrouve la filiation avec les photographes qui pensaient déjà la photographie en « livres » plutôt qu’en « magazines », dans lequel on retrouve la mise en série des images (se rapprochant ainsi du montage) pour les moduler en un tout. Ce sont des prises indépendantes faisant partie d’une succession, d’un ordre d’image. Livres sur la séquence photographique américaine : - American Photographs , Walker EVANS, 1938 : contre la photographie à but de propagande, ou d’actualité où l’image est toujours orientée par un texte, un commentaire > pratique réflexive, travail sur la mise en séquence des images, qui sont aussi séparées que liées - lien avec le cinématographique. Les associations sont entièrement soumises à notre propre regard). - Les Américains , Robert FRANK, 1958 : a parcourut les Etats-Unis sur la route. Il marque l’émergence d’une expressivité nouvelle, le reportage subjectif, grâce à la pratique du snap shot. Il introduit l’accident dans l’image, effets qui recherche le flou de mouvement, de mise au point, les fautes de cadrage, d’exposition > expérience fracturée, en contraste avec la photographie maitrisée et calculée. Documentaire expressif où la mise en page est très importante puisqu’elle introduit une temporalité pour le spectateur. La subjectivité est réellement au centre de sa démarche et bouleverse « les façons de voir et les manières de montrer » de la photographie- document. - Love on the Left Bank , Ed VAN DER ELSKEN, 1956 : livre plus explicitement cinématographique, pas seulement au niveau de la mise en séquence mais aussi en terme de style et de narration (fictionnelle : utilisation de flashbacks à la fin, mais pour décrire la vie quotidienne, la sienne, pas des évènements extraordinaires). Travail de montage beaucoup plus diversifié et volontaire, qui peut faire penser au roman photo. - /!/ William KLEIN, 1956 : Klein dit de son oeuvre que c’est un anti-livre : « Seul la séquence compte, comme dans un film. » (travail de montage quasi-cinématographique, on en retrouve même l’effet de mouvement par le choc des images entre elles). Bélour : « La séquence photographique est écartelée entre la représentation du film comme séquence virtuellement infinie et la recherche de l’instant unique. » Broadway by Light , W. KLEIN (1958)_ Il transpose l’agencement des images dans son livre en véritable montage cinématographique en prenant certaines libertés. Mais où est donc Polly Magoo ? W. KLEIN (1966)_ Portrait de Polly Magoo_ Il traite de la question de la production des images et y apporte son propre regard de photographe de mode. Il met ses photographies dans le film comme ressource de la fiction, ainsi que sa propre réflexion sur la photo. - Tulsa , Larry CLARK, 1971 : passe de la photographie documentaire au cinéma de fiction, il photographie son quotidien (en introduisant le concept de journal intime photographique). Sa photographie devient semblable à des recherches préalables à sa fiction, qui va s’inscrire dans cette continuité, dans un style réaliste assez brut. Kids né de son vécu personnel, qui s'entremêle à la fiction comme celui de ses acteurs. !A partir des années 80, la séquence photographique suscite un intérêt particulier, au moment où l’art se désagrège au niveau de la spécificité des médiums. Avec Paradise Regained (1968) Duane Michals fait prédominer la mise en scène photographique par rapport à la fixation du réel, il cré e un évènement au lieu d’en décrire un. Il met en avant la nature elliptique de la séquence, il joue du vide temporel entre deux images (la situation échappe à l’image, un hors- champ se crée). Ainsi, la séquence « suscite du temps » entre les images, « du temps qui ne tend ni vers l’illusion ni vers la durée, mais plutôt vers l’abstraction logique des cycles et des métaphores ; c’est de-là que la séquence tient son rythme magique et unique. » (cf. Things are Queer , 1972). Mac Adams utilise lui le narrativ void (vide narratif) pour désigner le caractère narratif de l’ellipse ; il produit des séquences de deux ou trois images et laisse le spectateur recomposer ce qu’il s’est passé parmi l’infinité de scénarios possibles. Au lieu d’être la preuve d’un évènement, la photographie devient l’hypothèse d’évènements multiples. !La séquence photographique se situe ainsi entre cinéma et photo puisqu’elle introduit de la durée dans l’image photographique et remet en question la définition de la photographie comme image unique et synthétique. Le montage narratif peut donc documenter, raconter un élément réel, mais aussi s’engager dans la fiction, raconter des histoires. 3. Diaporama/film photographique. !Rosaline KRAUSS a proposé l’idée que ces images hybrides appartiennent à la catégorie du « post-médium », qui vient mettre en crise l’idée même des catégories de médiums. C’est un brouillage qui se développe beaucoup à l’ère de la vidéo facile ; il est très proche du mouvement de l’art contemporain. Les réalisateurs brouillent aussi les frontières de ces médiums, leurs oeuvres étant ensuite désignées comme inclassables par la critique. Exemples : Chris MARKER ou Agnès VARDA, qui racontent des histoires en interrogeant la photographie par le cinéma ; films métadiscursifs (discours tenu sur les règles de fonctionnement du discours). La photographie est ainsi le support matériel du film et son sujet. Dans L’Entre-Images 1 , « Le spectateur pensif », Bellour reprend la proposition de Barthes (distinction des deux médiums pensée à partir du rapport du spectateur aux images) et dit qu’au cinéma, on est sensible au mouvement, alors qu’on est plutôt pris dans l’immobilité, la fixité, face à une photographie. Pour Barthes, le spectateur de cinéma est « pressé », prit dans le flux, alors que le spectateur de photo a le temps d’être pensif. Lorsqu’une photo apparait à l’écran, le temps se suspend, pouvant créer une fascination pour le film projeté ou une sorte de distance provoquée par l’arrêt de la narration (une pause pendant laquelle le spectateur peut réinvestir ses pensées). La photographie produit une image réflexive dans le film. Lorsqu’elle devient le support matériel du film, l’immobilité devient le principe du film plutôt que le mouvement. |
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