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Le registre tragiqueIl manifeste le sentiment de l’homme face aux forces (divines, sociales, morales) qui le dominent et l’écrasent malgré la résistance qu’il leur oppose.
THERAMENE J'ai vu, Seigneur, j'ai vu votre malheureux fils Traîné par les chevaux que sa main a nourris. Il veut les rappeler, et sa voix les effraie ; Ils courent. Tout son corps n'est bientôt qu'une plaie. De nos cris douloureux la plaine retentit. Leur fougue impétueuse enfin se ralentit. Ils s'arrêtent non loin de ces tombeaux antiques Où des Rois nos aïeux sont les froides reliques. J'y cours en soupirant, et sa garde me suit. De son généreux sang la trace nous conduit. Les rochers en sont teints ; les ronces dégouttantes Portent de ses cheveux les dépouilles sanglantes. J'arrive, je l'appelle, et me tendant la main, Il ouvre un oeil mourant qu'il referme soudain. Le ciel, dit-il, m'arrache une innocente vie. Prends soin après ma mort de ma chère Aricie. Cher ami, si mon père un jour désabusé Plaint le malheur d'un fils faussement accusé, Pour apaiser mon sang et mon ombre plaintive, Dis-lui qu'avec douceur il traite sa captive, Qu'il lui rende... A ce mot ce héros expiré N'a laissé dans mes bras qu'un corps défiguré, Triste objet, où des Dieux triomphe la colère, Et que méconnaîtrait l'oeil même de son père. THESEE O mon fils ! cher espoir que je me suis ravi ! Inexorables Dieux, qui m'avez trop servi ! A quels mortels regrets ma vie est réservée ! Jean Racine, Phèdre, V, 6, 1677 ANDROMAQUE de RACINE, 1667ACTE V, Scène première. Hermione, seule. Où suis-je ? Qu’ai-je fait ? Que dois-je faire encore ? Quel transport me saisit ? Quel chagrin me dévore ? Errante et sans dessein, je cours dans ce palais. v.1395 Ah ! ne puis-je savoir si j’aime ou si je hais ? Le cruel ! de quel œil il m’a congédiée : Sans pitié, sans douleur au moins étudiée ! L’ai-je vu se troubler et me plaindre un moment ? En ai-je vu tirer un seul gémissement ? v. 1400 Muet à mes soupirs, tranquille à mes alarmes, Semblait-il seulement qu’il eût part à mes larmes ? Et je le plains encore ! Et, pour comble d’ennui, Mon coeur, mon lâche cœur s’intéresse pour lui ! Je tremble au seul penser du coup qui le menace ! v. 1405 Et, prête à me venger, je lui fais déjà grâce ! Non, ne révoquons point l’arrêt de mon courroux : Qu’il périsse ! aussi bien il ne vit plus pour nous. Le perfide triomphe et se rit de ma rage : Il pense voir en pleurs dissiper cet orage ; v.1410 Il croit que, toujours faible et d’un cœur incertain, Je parerai d’un bras les coups de l’autre main. Je juge encor de moi par mes bontés passées. Mais plutôt le perfide a bien d’autres pensées : Triomphant dans le temple, il ne s’informe pas v. 1415 Si l’on souhaite ailleurs sa vie ou son trépas. Il me laisse, l’ingrat, cet embarras funeste. Non, non, encore un coup, laissons agir Oreste. Qu’il meure, puisqu’enfin il a dû le prévoir, Et puisqu’il m’a forcée enfin à le vouloir. v. 1420 A le vouloir ? Hé quoi ? c’est donc moi qui l’ordonne ? Sa mort sera l’effet de l’amour d’Hermione ? Ce prince, dont mon cœur se faisait autrefois Avec tant de plaisir redire les exploits, A qui même en secret je m’étais destinée v. 1425 Avant qu’on eût conclu ce fatal hyménée, Je n’ai donc traversé tant de mers, tant d’Etats, Que pour venir si loin préparer son trépas, L’assassiner, le perdre ?Ah ! devant qu’il expire… Fin de la scène 1 de l’acte V
POUR DIFFERENCIER REGISTRES PATHETIQUE ET TRAGIQUE Ces deux registres font appel aux mêmes procédés, champs lexicaux et expriment des émotions relatives à la douleur, la souffrance, le malheur, la mort. Toutefois ils ne sont absolument pas interchangeables. Il convient de les différencier. Le registre tragique présente des personnages hors du commun aux destins marqués par la fatalité. Il multiplie les procédés qui suscitent l’inquiétude et la fascination. Le registre pathétique présente des personnages proches du lecteur, placés dans des situations douloureuses. Il provoque la tristesse et la pitié. |
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