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La saga des FUTTERER de Winkel aux Etats-Unis 1905 - 1906 1) Historique des FUTTERER. 2) La famille FUTTERER Philibert – MALLET Madeleine. 3) L’émigration vers les Etats-Unis. 4) Les départs. 4.1 – François « Xavier » PELTIER et son épouse Adèle PELTIER née NEUVILLE 4.2 – Joseph FUTTERER 4.3 – Auguste FUTTERER et son beau-frère Emile ECKERT 4.4 – La grand-mère Madeleine FUTTERER née MALLET, sa belle-fille Philomène FUTTERER née MARCHAND, et ses petits-enfants Léontine FUTTERER et René FUTTERER 4.5 – Thérèse ECKERT née FUTTERER et son fils Eugène ECKERT 4.6 – Aloïse FUTTERER son épouse Philomène née HOSATTE et ses enfants Fernand FUTTERER et Fernande FUTTERER 4.7 – Lucien FUTTERER et la guerre 4.8 – Le retour de PELTIER Adèle née NEUVILLE avec son fils Robert PELTIER. 5) Conclusion. 1) Historique des FUTTERER F ![]() Le nôtre, Michel FUTTERER y est chasseur (ou forestier). Il y épouse en 2° noces, le 20 mai 1710 Catherine ZINCK qui lui donnera 5 enfants. Le cadet Antoine naît le 25 juin 1727 à Forchheim. En 1759 il se trouve déjà à Lucelle, marié à FLEURY Anne Marie. Il est maître-chasseur et garde forestier du domaine de l’abbaye de Lucelle, habite au Kohlberg du haut. Plus tard l’abbaye de Lucelle lui réduit le bail d’un bâtiment du Scholis « pour bons et loyaux services ». Bâtiment qu’il restaurera plus tard pour son usage personnel. Il décède à Pleigne le 28 mai 1805. Son fils aîné Antoine, lui aussi garde forestier est né le 10 février 1759 à Lucelle. Il se marie le 8 mai 1781 à Lucelle avec Madeleine DITNER d’Ammertzwiller qui lui donne 7 enfants. En secondes noces il épouse Anne Françoise JARDON le 22 août 1802 à Winkel. De qui il a encore 4 enfants. L’aîné Antoine est né le 2 novembre 1782 à Winkel et se marie le 30 juin 1812 à Winkel avec BLIND Anne « Marie ». Ensemble ils ont 5 enfants. Parmi eux, Laurent né le 8 novembre 1815 à Winkel, marié le 18 mai 1843 à Winkel avec FROEHLY Marie Anne qui lui donne 5 enfants dont leur aîné Philibert, né le 1 octobre 1843 qui sera le départ de l’histoire ci-dessous. En Allemagne, l’orthographe du nom à Forchheim est FÜTTERER, de l’origine des registres paroissiaux à nos jours. Chez nous en Alsace, il a parfois été rajouté un « E » pour devenir FUETTERER. De temps en temps il y a eu quelques variations qui n’ont pas prospéré, telles FURTER, FUETERER, FUDERER, FOUETERER, FUETTER… Quand à moi, je les orthographierai FUTTERER tel l’état civil de ma grand-mère paternelle et de sa branche à Courtavon issue de celle de Lucelle. Dans le Haut-Rhin on les trouve à Winkel, Lucelle, Durlinsdorf, Courtavon, Oberlarg, Hirtzbach, Walheim. Dans le Territoire de Belfort ils sont à Valdoie, Auxelles-Bas, Chaux, et Belfort. En Suisse il y en a à Charmoille, Pleigne, Roggenburg. Il existe également une autre souche dans le Bas-Rhin (Illkirch, Strasbourg, Haguenau, Walck, Ingwiller). ![]() C’est, aujourd’hui encore dans le canton d’Emmendingen (en rouge sur la carte), où se trouve Forchheim, que l’on recense la plus grande « densité » de FUTTERER en Allemagne. 2) La famille FUTTERER Philibert – MALLET Madeleine En cet automne 1871, la 3° République vient de naître après la chute de Napoléon III et la perte de l’Alsace-Lorraine. Le mercredi 13 septembre 1871 se marient à la mairie de Winkel FUTTERER Philibert et MALLET Madeleine. Ils ont 27 ans tous les deux. Elle a déjà un fils naturel prénommé Charles, né 2 ans plus tôt, le 22 avril 1869 à Winkel qu’ils légitimeront à l’occasion de leur mariage. Ils n’opteront pas pour la nationalité française et deviendront donc allemands comme toutes les personnes qui sont restées en Alsace. Elle, Madeleine, est née enfant naturelle le 22 octobre 1843 à Huningue, ville de garnison. Sa maman, Catherine LORENTZ, native de Bettendorf, une couturière de 20 ans, vient de perdre sept mois plus tôt, sa première fille âgée de 26 mois, qu’elle avait prénommé Madeleine. Elle doit être très triste et pour perpétuer le souvenir de cet enfant, elle fait déclarer à l’état civil, comme prénom pour la deuxième, « Madelon ». Elle aura même encore un troisième enfant naturel en 1845 avant son mariage le 5 décembre 1848 à Lille dans le Nord avec Michel MALLET, né à Colmar le 5 octobre 1817 de parents vignerons. C’est donc à l’occasion de cette union que les enfants naturels sont non seulement légitimés, mais aussi reconnus par le père, trompette au 7° régiment de chasseurs à cheval. Cette unité est appelée en Algérie où la France mène des « opérations » depuis 1831. Catherine sa femme est également du voyage puisqu’elle est « cantinière » à ce même régiment. Malheureusement celle-ci décède, tout près d’Alger, à Blidah le 11 novembre 1858. Sa fille Madeleine a alors 15 ans. Le père Michel devenu brigadier-trompette s’installe à Colmar à sa retraite et y décède 22 mars 1870. ![]() Lui, Philibert (exactement Philiper sur son état civil), est né le 1er octobre 1843 à Winkel, sous le règne de Louis-Philippe. Son père Laurent est alors un charretier de 28 ans et sa mère Marie Anne FROEHLY est ouvrière. Il est l’aîné d’une fratrie de 5 enfants nés à Winkel entre 1843 et 1853. Ils vivent à Winkel où ils élèvent ensemble leurs enfants: - FUTTERER, Charles né le 22 avril 1869 - FUTTERER, Aloïse né le 6 avril 1872 - FUTTERER, Auguste né le 28 septembre 1873 - FUTTERER, Philibert né le 9 décembre 1874 - FUTTERER, Alphonse né le 12 février 1876 - FUTTERER, Madeleine née le 1er décembre 1877 - décédée le même jour. - FUTTERER, Thérèse née le 4 février 1879 - FUTTERER, Antoine né le 28 février 1881 Tous les petits métiers ruraux, permettant de vivre à la campagne sont exercés par Philibert. Néanmoins leur situation semble se dégrader : En 1871 il est bûcheron En 1872, 1873 il est « Führmann » (charretier) En 1874 il est « Ackersmann » (cultivateur) En 1876, 1888, 1881 il est « Tagelöhner » ou « Tagner » (journalier) De grands changements s’annoncent. La situation se détériore toujours, l’exploitation agricole de Winkel ne permettra certainement pas de faire vivre toute la famille dont les enfants grandissent et deviennent des hommes qu’il faut nourrir. N’oublions pas, qu’il y a là 6 garçons et que très rapidement ils devront également subvenir à leurs propres besoins. Alors entre 1881 et 1886 ils quittent l’Allemagne, les sources de l’Ill et le village de leurs ancêtres, déménagent et vont s’installer en France dans le Territoire de Belfort où il y a diverses industries dont du textile. C’est à Morvillars que toute la famille s’installe. Puis il y encore la naissance d’un enfant Joseph vers 1886. Malheureusement Philibert meurt très peu de temps après, soit le 20 septembre 1887 à l’hospice de Delle, et la maman élève donc seule cette grande famille de 8 enfants dont le dernier est âgé d’à peine plus d’un an. Néanmoins les enfants grandissent, travaillent à l’usine, se marient et ont des enfants:
Comme nous venons de le voir, tous ont abandonné les métiers de la terre pour entrer dans l’industrie. Mais au bout de quelques années seulement de cette vie à l’usine avec certainement des conditions environnantes pénibles (à cette époque la durée légale du travail était de 10 heures par jour avec 2 heures supplémentaires au maximum et ce 6 jours sur 7), une quinzaine de personnes de cette famille, en moins de 2 ans, décide de faire le grand saut et de traverser l’Atlantique pour tenter de trouver une vie meilleure. 3) L’émigration vers les Etats-Unis. Depuis leur création, les Etats-Unis sont une terre d’immigration, c’est le pays qui accueille le plus d'immigrants au monde. En 1780, un Américain sur quatre était le descendant d'un Anglais ou d'un Irlandais. De 1840 à 1860, les Etats-Unis reçurent la première vague importante d'immigrants, composée d'une majorité d'Européens : Irlandais, Allemands ou Juifs d'Europe de l'Est. De 1892 à 1924, près de seize millions d’émigrants en provenance d’Europe sont passés par le port de New York à Ellis Island (appelée également l’île aux larmes), un îlot de 14 hectares où avait été aménagé, sur ordre du gouvernement, un centre de transit, tout près de la statue de la Liberté. Il arrivait jusqu'à dix mille émigrants par jour. La plupart de ces émigrants, des opprimés, des déshérités, étaient pauvres, bien souvent, miséreux. Pour eux, le rêve américain n'était pas une vaine idée mais l'espoir d'une terre juste et généreuse. Tous avaient l'angoisse d'être refoulés. Les personnes malades étaient renvoyées vers leur pays d'origine, parfois même vers un autre pays. Si un enfant était malade, sa mère devait l’accompagner pour son retour. 250 000 personnes (2%) furent refoulées d'Ellis Island. On comptabilise aussi quelques 3000 suicides de 1892 à 1924. Il y avait 3 classes sur les bateaux, la 1ère dans les étages supérieurs destinés aux riches, la 2ème dans les étages médians pour les voyageurs d’affaires et la 3ème dans les étages inférieurs pour les immigrés et les pauvres. Leurs conditions de voyage étaient rudes, plus d’une semaine de traversée sur les ponts et les entreponts des bateaux. A l'époque le voyageur de 3ème classe était transporté sans que l'on se préoccupe d'un minimum d'hygiène à son égard. Les émigrants étaient entassés sur les ponts dans des conditions de promiscuité lamentables "entassés comme des bestiaux". Les difficultés d’intégration dans la société américaine étaient grandes. La plupart des émigrants ne connaissaient pas la langue. Les modes de vie, le climat, l’alimentation, changeaient énormément et perturbent souvent les gens. A l’arrivée tous ne possédaient pas les 50 $ conseillés. Parmi eux 560.000 Français. Ils embarquaient à Dunkerque, Bordeaux ou essentiellement au Havre. ![]() Au Havre, les trains arrivaient jusqu’au quai d’embarquement des paquebots 4) Les départs. Tous les départs traités ci-dessous s’effectuaient depuis le port du Havre sur des paquebots de la Compagnie Générale Transatlantique (dite la Transat) construits sur les chantiers de Penhoët à Saint Nazaire. Le trajet pour y arriver était fait en train que la dite compagnie avait mis en place pour drainer une partie des migrants d'Allemagne du sud, de Suisse, d'Italie et d'Autriche vers ses paquebots au port du Havre. Ce train partait de Bâle, passe par Delémont, Porrentruy, Belfort, la ceinture de Paris (la Villette, les Batignolles) puis Rouen avant d'arriver à destination après 780 km et une moyenne de 21 heures de trajet. La traversée elle-même durait 7 jours, parfois plus. Les formalités de débarquement prenaient 1 ou 2 jours supplémentaires. Tous les passagers était recensés par les services de l’immigration de l’administration américaine sur des listes appelées « manifest » qui ont été conservées, archivées et sont consultables. ![]() Exemple d’un manifeste où l’on peut voir (lignes 6 à 9) une famille FUETTERER Exemple d’un manifeste où l’on peut voir (lignes 6 à 9) une famille FUETTERER d’Auxelles Bas Il doit y avoir des difficultés à communiquer sur les bateaux car de très nombreuses nationalités y sont représentées. Parmi elles des alsaco-franco-allemands (n’oublions pas la défaite de Sedan et le traité de Francfort qui enlève l’Alsace et une partie de la Lorraine à la France en 1871), c’est le clan des FUTTERER. 4.1 – François « Xavier » PELTIER et son épouse Adèle PELTIER née NEUVILLE Le premier à quitter Valdoie est François « Xavier » PELTIER (le frère de Marie « Céline » PELTIER épouse de Charles FUTTERER l’aîné de la fratrie). Natif d’Evette, il a 23 ans et est accompagné de son épouse Adèle PELTIER née NEUVILLE native de Médière, canton de l’Isle sur le Doubs, âgée de 20 ans. Il est manœuvre d’usine fils de manœuvre et elle est retordeuse et fille de chiffonnier. Ils embarquent le 1er juillet 1905 au Havre sur « la Savoie ». A l’arrivée le 7 juillet 1905 à New-York, avec 56 $, ils déclarent se rendre à Torrington dans le Connecticut chez leur oncle Deloge Joseph. ![]() « La Savoie » est un paquebot de 170 mètres de long et de plus de 18 mètres de large, développe 22.000 chevaux et navigue à 20 nœuds. second d’une paire de deux navires construits à Saint Nazaire, le premier étant « la Lorraine » c’est, à l’époque, le plus grand paquebot français. Mis en service en 1901, il termine sa carrière en 1927. « La Savoie » à la gare maritime du Havre 4.2 – Joseph FUTTERER Joseph FUTTERER, le plus jeune des 9 enfants de Philibert FUTTERER et Madeleine MALLET quitte Valdoie et ses parents. Il est célibataire et a 19 ans. Il se dit électricien. Il embarque le 9 septembre 1905 sur « La Tourraine » et arrive à New-York le 16 septembre 1905. Il a 40 $ en poche et déclare vouloir se rendre chez son oncle LECOMTE Charles à Manchester Connecticut PO. Peut-être même a-t-il partagé quelques conversations pendant la traversée avec des gens de son village, car en même temps, sur le même bateau, il y a une famille de Valdoie. Ce sont WALTZER Emile, un laboureur de 42 ans, son épouse Hermonca 32 ans, ses 3 enfants Emilie 6 ans, René 4 ans, Lucien 2 ans et la grand mère Françoise, veuve de 59 ans. Ils ont 100 $ et vont chez leur oncle à Adams dans le Massachusetts. ![]() « La Tourraine », est un paquebot de 157 mètres de long, pouvant transporter 1090 passagers, construit en 1891. Il était alors le plus grand paquebot français en tonnage et le cinquième dans le monde. Il était également le dernier paquebot de la Compagnie à posséder des voiles. Entré en service en juin 1891 sur la ligne Le Havre-New York, il était alors le navire le plus rapide de la Transat, il atteignit la vitesse moyenne de 21,2 nœuds en juillet 1892 au cours d’une traversée de l’Atlantique en 6 jours 17 heures et 30 minutes. Entre 1900 et 1902, il est complètement refondu et modernisé. Un de ses mâts est supprimé. En janvier 1903, un incendie endommage une grande partie des aménagements pour passagers. A partir de 1913, il effectue l’été des rotations avec le Canada. En octobre 1913, il se porte au secours du paquebot italien « Volturno » en feu au milieu de l’Atlantique et en recueille 42 rescapés qu’il débarque à New York. Pendant la Première Guerre mondiale, il continue à assurer le service de New York et est brièvement utilisé comme croiseur auxiliaire. De juin à août 1923, il est utilisé comme hôtel flottant à Göteborg, en Suède durant une foire-exposition. A cette occasion, il est rebaptisé « Maritime » et sa coque est repeinte en gris, avant d’être démoli à Dunkerque fin 1923. 4.3 – Auguste FUTTERER et son beau-frère Emile ECKERT Auguste FUTTERER 32 ans domicilié à Valdoie et Emile ECKERT 28 ans de Belfort, son beau-frère, mariés tous les 2, vont partir sans épouse, ni enfants. Ils ont certainement pensé qu’il leur serait ainsi plus facile de préparer la venue de leur famille. Ils passeront quelques temps seuls, puis feront venir leurs proches. Ils ont chacun 40 $ en poche et déclarent se rendre à Pittsburg, le premier chez son frère Joseph (§ 4.2) et le second chez son père. Ils voyagent sur « La Lorraine » qui quitte Le Havre le 3 mars 1906 et arrive le 11 mars 1906 à New-York. ![]() « La Lorraine » est un paquebot de 170 mètres de long et de plus de 18 mètres de large, développe 22.000 chevaux et navigue à 20 nœuds. Premier d’une paire de deux navires construits à Saint Nazaire, le second étant « la Savoie », c’est, à l’époque, le plus grand paquebot français. Sa carrière fût entachée, dès l’origine, par de nombreuses défaillances techniques et par quatre abordages. Il est mis en service en août 1900 sur la ligne Le Havre-New York. En août 1914, il est converti en croiseur auxiliaire et rebaptisé « Lorraine II ». Il est utilisé comme transport de troupes à compter de 1917, sous son nom d’origine, puis est remis en service sur la ligne Le Havre-New York en février 1919 et enfin vendu à la démolition à Penhoët fin 1922. 4.4 – La grand-mère Madeleine FUTTERER née MALLET, sa belle-fille Philomène FUTTERER née MARCHAND, et ses petits-enfants Léontine FUTTERER et René FUTTERER Madeleine FUTTERER née MALLET la grand-mère a 63 ans. Pourtant aux services de l’immigration elle n’en déclare que 57. A t’elle voulu se rajeunir pour avoir plus de chances de ne pas être refoulée ? Elle est veuve depuis presque 20 ans. Elle qui rêvait certainement de grand voyage depuis son retour d’Algérie il y a plus de 40 ans, va franchir le pas. Elle repense à sa destinée avec tous ses aléas : née enfant naturelle, reconnue à 5 ans à Lille, la traversée de la Méditerranée, le décès de sa mère à 15 ans, son état de fille-mère, son mariage, le grand déménagement familial de Winkel à Valdoie, la mort de son mari, et maintenant l’Amérique. C’est sans regrets qu’elle quitte la France. Elle est accompagnée du reste de la famille d’Auguste (§4.3), c'est-à-dire de sa belle-fille Philomène FUTTERER née MARCHAND 32 ans et de ses deux petits-enfants Léontine FUTTERER 8 ans et René FUTTERER 4 ans. Ils partent sur « La Provence » le 14 juillet 1906 et arrivent le 20 juillet 1906 avec 100 $ et déclarent se rendre à Pittsburg chez Auguste. Sur le bateau elles auront certainement « papoté » du pays car il y a des concitoyens de Delle, d’Offemont, de Bavilliers, de Valentigney, de Belfort et même de leur village Valdoie. En effet Emile GSELL 40 ans (fileur), se rend chez son frère Martin à Rockville, accompagné de sa femme Céline 38 ans, et de leurs enfants Anne 15 ans, Louis 13 ans, Léa 5 ans, Marthe 3 ans, Marie 2 ans, Jeanne 1 an. ![]() Leur paquebot « La Provence » flambant neuf, était à l’époque le plus grand (longueur 190,67 m. et largeur 19,78 m.) et le plus rapide (21,5 nœuds) paquebot français mais, ses dimensions ayant été dictées par les capacités d’accueil maximales du port du Havre, son tonnage était alors très inférieur aux grands paquebots transatlantiques des concurrents étrangers. « La Provence » fut également le premier paquebot de la Compagnie équipé de la télégraphie sans fil et c’est à son bord que fut imprimé le premier exemplaire de "L’ Atlantique", le journal destiné aux passagers qui sera ensuite imprimé et diffusé sur tous les paquebots transatlantiques jusqu’à l’arrêt du « France » en 1974. Mis en service en avril 1906 sur la ligne Le Havre-New York où il assure le service express en compagnie des paquebots « La Lorraine » et « La Savoie », de dimensions plus réduites. Au retour de son deuxième voyage, il effectue une course mémorable avec le paquebot allemand « Deutschland », qu’il bat finalement de 4 heures. A bord, les passagers fortunés avaient engagé des paris. En 1914, est converti en croiseur auxiliaire et rebaptisé « Provence II ». En 1915, est transformé en transport de troupes. Le 26 février 1916, alors qu’il transportait 1.800 hommes de troupe, il est torpillé au large du Cap Matapan, en Méditerranée, par le sous-marin allemand U 35. Le navire sombre rapidement, emportant près de 1.000 victimes. 4.5 – Thérèse ECKERT née FUTTERER et son fils Eugène ECKERT Thérèse ECKERT née FUTTERER a 27 ans. Elle est blonde aux yeux bleus et mesure 5 pieds et 2 pouces et demi (soit 1m60). Elle est accompagnée de son fils Eugène ECKERT de 3 ans. Avec 50 $ en poche, elle est heureuse de rejoindre son mari parti 6 mois plus tôt. Elle déclare donc se rendre chez lui, Emile ECKER à « Washinghouse works à Pittsburg ». Ils sont partis du Havre le 22 septembre 1906 sur le même bateau « La Provence » (voir description au § 4.4) que sa belle-mère et sa belle-sœur avaient utilisé 2 mois plus tôt. Pendant la traversée son enfant est emmené à l’hôpital du bateau où il décède. Sur la liste des passagers il est noté : « Cert. Infantile paralysis » accompagné d’un tampon « Deed in hospital ». Cela devait être quelque chose qui arrivait souvent puisque l’autorité avait fait faire un tampon portant cette mention. Très malheureuse, elle arrivera donc seule à New-York le 28 septembre 1906 et le père ne reverra plus jamais son fils. 4.6 – Aloïse FUTTERER son épouse Philomène née HOSATTE et ses enfants Fernand FUTTERER et Fernande FUTTERER Aloïse FUTTERER mesure 5 pieds 5 pouces (1m65) et son épouse Philomène née HOSATTE 5 pieds et 1 pouce (1m55). Ils habitent à Auxelles Bas avec leurs deux enfants Fernand FUTTERER 7 ans et Fernande FUTTERER 4 ans. Aloïse a déjà exercé toutes sortes de professions : il était d’abord tréfileur, puis ajusteur, en 1902 il était alors épicier à Chaux. Comme ces collines pré-vosgiennes ressemblent aux contreforts du Jura qu’il connaissait si bien à Winkel pour y avoir usé les semelles de ses sabots. Il avait alors 10 ans. Maintenant il en a 35, comme sa femme, et pour tenter une aventure il est encore temps. Il fait froid en ce mois décembre 1906 au pied de la montagne, mais peu importe, ils ont décidé de partir et ils commenceront la nouvelle année sur le bateau. Ils embarquent donc sur le vieux paquebot de plus de 20 ans d’âge « La Bretagne » le 29 décembre 1906 et arrivent à New-York le 7 janvier 1907. Il déclare être électricien et se rendre à Raddock chez son jeune frère Joseph FUTTERER (voir § 4.2) parti 15 mois plus tôt. « La Bretagne », est le dernier d’une série de quatre paquebots, tous mis en service en 1886. (les Sister-ships : « La Champagne », « La Bourgogne » et « La Gascogne » et « La Bretagne »). Il s’échoue lors de son lancement en août 1885. Mis en service en août 1886 sur la ligne Le Havre-New York, il mesure 150 m. de long et 15,76 m. de large. Son moteur développe 9000 chevaux pour une vitesse de 17,5 nœuds. En 1895, il est équipé de chaudières neuves et d’une machine à quadruple expansion. S ![]() Au sujet de la naissance du fils Fernand qui vient de partir avec ses parents, on peut noter dans le registre de l’état civil de Valdoie, en face de la dite naissance, un petit billet collé (toujours encore en place) qui stipule : « Fernand FUETTERER né le 13/3/1899 à Valdoie est recherché pour insoumission. Au cas où il demanderait le relevé de son acte de naissance ou toute autre pièce, en informer le commandant de gendarmerie en lui indiquant l’adresse du recherché ». ![]() La France avait besoin de ses forces vives pendant cette guerre de 14-18 et les moyens étaient mis en place pour que tout le monde fasse son devoir. Mais dans ce cas, cela n’aura servi à rien Fernand était bel et bien en Amérique. 4.7 – Lucien FUTTERER et la guerre. Nous sommes en 1913. Cela fait bientôt 10 ans qu’ils ont quitté la France. L’aîné de la fratrie, Charles FUTTERER était, quand à lui, resté à Valdoie. Ses enfants ont grandi. Son plus grand fils, Lucien FUTTERER, avec ses cheveux noirs, a bientôt 20 ans et n’est pas marié. Il a déjà lu des dizaines de lettres de ses oncles et de ses tantes d’Amérique. Ses cousins, cousines, sont devenus des adolescents. Ici le travail à l’usine est dur, monotone, mal payé. Et puis les évènements dans les Balkans ne sont pas très rassurants, là-bas ils se battent. Il ne faut pas beaucoup d’autres arguments pour le convaincre. Ce qui l’ennuie un peu, c’est de ne pas pouvoir passer Noël auprès des siens, mais c’est décidé il partira. L’immense bateau « France » part le 27 décembre 1913 du Havre et arrive le 3 janvier 1914 à New-York. Les fastes et les flonflons du réveillon des premières classes parvenus à ses oreilles ont ravivé en lui tristesse et mélancolie dans cet hiver glacial qui laisse des traces de gelée sur le pont. Il déclare aller chez son oncle PELTIER Xavier (voir § 4.1) à Sauth Manchester. M ![]() ![]() En France, le 42ème Régiment d’infanterie du 7ème corps d’Armée, dit « régiment As de carreau » est encore en garnison à Belfort en août 1914, puis il participe aux opérations d’Alsace (Pont d’Aspach, Burnhaupt, Mulhouse, Rixheim, Dornach), de la Somme (Proyart), à la bataille de la Marne, de l’Aisne et de l’Oise. En 1915 il se trouve sur le plateau des Loges, aux combats de Crouy, puis à Quennevières dans l’Oise. Et c’est exactement ici que nous y retrouvons Lucien FUTTERER, soldat de 2ème classe au 42ème régiment d’infanterie, tué à l’ennemi, mort pour la France, le 16 juin 1915, lors de la dernière offensive de ce qui a été la bataille de Quennevières du 6 au 16 juin 1915. Combien de temps est-il resté aux Etats-Unis ? Quand est-il revenu ? Qu’est-ce qui a motivé cette décision ? A-t-il eu des regrets ? On ne le saura sans doute jamais. La Bataille de Quennevières Début mai 1915, le Général Nivelle commandant la 61ème Division de Réserve, correspond avec le Général Ebener, commandant le 35ème Corps d’Armée et le Général Dubois de la 6ème Armée. Leurs propos évoquent une éventuelle attaque sur les abords de la Ferme de Quennevières afin de réduire le saillant entre Puisaleine et Moulin-sous-Touvent. Dès le 31 mai, les 73ème et 121ème Brigades sont désignées pour accomplir l’attaque. Pour ce faire, elles reçoivent en renfort plusieurs compagnies provenant des divisions voisines. La 73ème Brigade a pour mission de prendre les tranchées allemandes entre la Ferme des Loges (La Bascule) et celles faisant face à la Ferme de Quennevières. La 121ème, quant à elle, doit prendre la route de Moulin-Sous-Touvent ainsi que le ravin de la côte 111 (Ravin du Martinet). En secret, plusieurs batteries de différents calibres renforcent le dispositif mis en place par l’Etat-Major. Le 4 juin, les ordres N°463 et 467 de la 6ème Armée prévoient au 35ème Corps d’Armée d’exécuter l’attaque le lendemain. Quelques heures plus tard, un contre-ordre la repousse au 6 juin. L’artillerie ouvrira le feu à 10 heures et l’infanterie s’élancera le 6 juin à 10h15. La décision prise, le Général Nivelle installe son poste de commandement dans la maison du gardien à l’entrée du parc d’Offémont, alors que le Général Ebener investi le château. Le 6, vers 4h50, une mine explose sous les tranchées ennemies puis les tirs d’artilleries français s’accentuent. A 10 heures, les derniers soldats prennent place contre le parapet. A l’heure H, la première vague s’élance. En moins d’une demi-heure, les premières lignes allemandes et la route de Moulin-Sous-Touvent sont enlevées à coups de grenades et de baïonnettes. La surprise est totale, l’ennemi est en déroute. Une section de poilus parvient à franchir le Ravin du Martinet. Ils détruisent trois canons allemands de 77, après avoir abattu leurs servants, mais se trouvant isolés et trop avancés, ils sont contraints de rebrousser chemin. Vers 11 heures, une deuxième vague de zouaves et de poilus s’élance pour venir soutenir les tranchées conquises et repousser toute contre-attaque ennemie. 35 minutes plus tard, les zouaves aidés par les tirailleurs attaquent à nouveau en direction de la Bascule mais le réseau de barbelés ennemi insuffisamment détruit par les tirs d’artilleries empêche toute progression. L’attaque est stoppée et l’après-midi est occupée à creuser des boyaux de liaison entre l’ancienne première ligne française et les positions conquises. En soirée, les fantassins ayant combattu sont remplacés par des combattants capables de faire face à une éventuelle attaque de nuit. Le lendemain, l’état major de la 35ème armée déclare avoir fait 246 prisonniers du 86ème Régiment de Fusiliers de la Reine et avoir perdu environ 2000 hommes. Le terrain conquis représente environ 1000 mètres de largeur sur autant de profondeur. ![]() Ruines de la ferme de Quennelières Le 8 juin, les Allemands passent à l’offensive en bombardant pendant plus de 8 heures les tranchées perdues l’avant-veille et provoquent la perte supplémentaire de 200 poilus. Pendant ce temps, des soldats, sous-officiers et officiers ayant participé à l’attaque reçoivent la Croix de Guerre devant le château d’Offémont. En soirée, le Général Nivelle, enthousiasmé par la réussite de l’attaque, décide en relation avec son état-major, de poursuivre l’offensive le 12 juin. Mais le manque de temps pour la préparation fera repousser l’attaque au 15. L’ennemi, quant à lui, renforce son artillerie et organise une nouvelle première ligne. Le 14 juin, il prend de court les Français en lançant une attaque avec un régiment de réserve. Son artillerie détruit les tranchées et les abris. Sous la pression, les poilus doivent concéder le terrain conquis. Les plans français sont déjoués malgré une contre-attaque de nuit peu fructueuse. Les généraux décident alors de repousser l’attaque au 16 juin, avec comme objectif principal le lieu dit ‘’La Bascule’’. A la date convenue, à 6 heures du matin les soldats mêlés aux zouaves, partent à l’assaut. Mais cette fois-ci, l’ennemi bien renseigné sur les intentions de l’adversaire enclenche un tir de projectiles de toutes sortes puis contre-attaque à midi et reprend encore du terrain menaçant d’encerclement le 42ème R.I. français (Régiment de Lucien FUTTERER). L’offensive ne peut plus progresser. A 15 heures, le Général Nivelle, ordonne une nouvelle attaque et parvient à le dégager. L’artillerie allemande redouble d’intensité forçant les poilus à battre en retraite de façon définitive. Ainsi, après avoir perdu le terrain conquis le 6 juin, l’offensive de Quennevières fut désignée par l’état major français comme une demi-victoire sur l’assaillant. Mais avant tout, une véritable occasion d’enfoncer les lignes allemandes en profondeur avait été manquée par l’absence de combattants en réserves. http://www.patrimoinedelagrandeguerre.com/section-oise/batailles.pdf 4.8 – Le retour de PELTIER Adèle née NEUVILLE avec son fils Robert PELTIER. Après ce terrible conflit mondial, et 15 ans après son départ, PELTIER Adèle née NEUVILLE a certainement eut envie de revoir son pays, ses parents. Les conditions sont plus propices et elle a entendu parler des « années folles » en France. Elle va entreprendre, à 35 ans, un pèlerinage aux sources et nous la retrouvons au Havre, qu’elle quitte donc une seconde fois le 9 septembre 1920 à bord du « Niagara » et arrive à New-York le 20 septembre 1920. Elle déclare aller chez son mari à : « South Manchester, 49 Middele Turnipihe – Connecticut » et la personne à prévenir est « son père Joseph Neuville 21 rue Carnot - Belfort ». Et puis comme leurs affaires en Amérique ne marchent pas trop mal, elle peut maintenant voyager en seconde classe : oubliées la médiocrité, la promiscuité, l’insécurité et l’insalubrité de la 3ème classe de 1905 ! C’est donc mieux également pour son fils Robert PELTIER âgé de 6 ans et 8 mois, qui l’accompagne pour ce grand voyage. Ainsi il aura pu faire la connaissance de ses grands parents à Belfort et fouler le sol de ses ancêtres, alors qu’il est déjà citoyen américain né à Sauth Manchester au début de l’année 1914, haut de 3 pieds (91 cm). E ![]() 5) Conclusion. C’est ainsi que, de Winkel aux Etats-Unis, d’émigrés ils sont devenus immigrés et maintenant leurs descendants sont des américains à part entière. L’histoire se renouvelle toujours ! Malheureusement, il me parait difficile de retrouver leur trace là-bas, à moins que ce texte, sans prétentions particulières, ne serve un jour à renouer ce lien ? Sources :
Jean MARTIN 6, rue du calvaire 68520-BURNHAUPT-LE-HAUT |
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